Fidy est venue vivre à Antananarivo, la capitale de Madagascar après un divorce. Elle travaille dans un gargote et vit loin de ses enfants. La jeune grand-mère accepte de nous confier ses conditions de vie et son rêve.

 

                             

 

Fidy gagne environ 1 euro par jour

Nous rencontrons Fidy sur son lieu de travail. Elle gagne sa vie en travaillant dans une des gargotes implantées dans les pavillons du marché couvert de Mahamasina. Mahamasina, quartier non loin du centre-ville est réputé pour son marché qui se tient tous les jeudis.  D’abord, il y a le marché couvert, officiel, situé à l’est du stade. On y trouve des étals de fruits et légumes, des pavillons de boucheries, d’épiceries et de gargotes. Ensuite, il y a le grand marché à ciel ouvert qui s’installe officieusement autour du stade. Vendeurs de vêtements, de chaussures, de jouets, marchands de fruits et légumes, de friandises et gargotiers ambulants s’approprient de la rue et des trottoirs, provoquant un désordre total de la circulation, une fois par semaine. Employée par sa sœur aînée, Fidy décrit son métier : « Je sers les clients, je m’occupe de la vaisselle, je fais les courses et dès fois, je prépare les achards de légumes. » Sa sœur la rémunère 4.000 Ariary par jour (un peu plus d’un euro) et l’aide à payer le loyer.

 

Pas d’électricité ni eau courante

Fidy habite à Anosizato, un quartier populaire et difficile, à environ une heure à pied de Mahamasina. Elle loue un modeste deux-pièces dans une maison en brique couverte d’un toit en tôle. La chambre et la cuisine constituent son intérieur, meublé d’un lit, d’une table et de six chaises. La salle de douche et les toilettes se trouvent dans des cabines extérieures, une situation fréquente dans les foyers modestes. Fidy ne bénéficie pas d’électricité et dispose d’eau courante grâce à un robinet extérieur. Son loyer mensuel s’élève à 20.000 Ariary (environ six euros). A 47 ans, Fidy vit seule. Elle a débarqué dans la capitale en 2006, après son divorce. « Je voulais prendre un nouveau départ », nous explique-t-elle. Fidy vient, en effet, d’une petite ville provinciale des hautes terres, Fandriana, située à environ cinquante kilomètres d’Ambositra. Elle est mère de trois enfants. Les deux aînés, une fille de 28 ans et un fils de 23 ans, ont fondé leurs propres familles et ont respectivement un enfant. Le plus jeune, Tolotra, 16 ans, est resté avec son père à Fandriana. Fidy nous confie avec amertume: « mon ex-mari s’est opposé à ce que mon fils vienne vivre avec moi dans la capitale ». Toutefois, notre ouvrière doit envoyer régulièrement une partie de son salaire pour payer les frais scolaires de son enfant. En contre-partie, elle profite de sa présence à chaque période de vacances. Le jeune homme passe ses journées de repos à aider sa mère et sa tante à la gargote.

 

Pas de radio ni de télé

La vie de Fidy est réglée comme un papier à musique. La semaine, elle se réveille à quatre heures. Après un brin de ménage et un petit-déjeuner rapide composé de café et de pain, Fidy commence son service par un passage obligé au marché de Nosibe. Ensuite, elle se rend à la gargote et enfile son tablier d’aide-cuisinière, serveuse et plongeuse. Fidy, ainsi que ses collègues, déjeunent après le rush du midi-quatorze heure. La journée se termine quand la vaisselle est lavée, rangée, les tables nettoyées et la salle prête à accueillir les clients du jour suivant. Fidy ramène souvent les restes à la maison en guise de dîner. Elle rentre vers dix-sept heures trente. Le temps de se doucher, de réchauffer les plats invendus ou de cuire une bouillie de riz et elle se met au lit. En général, elle se couche vers dix-neuf heures trente, ne disposant ni de radio ni de télé pour se divertir. Le samedi, Fidy s’occupe de la lessive. Le dimanche, elle se rend à l’église le matin et se repose l’après-midi. Fidy rêve d’améliorer ses conditions de vie afin de pouvoir continuer à soutenir financièrement son fils dans ses études. « Je voudrais qu’il aille le plus loin possible et qu’il réussisse dans sa vie professionnelle », conclut celle qui a quitté l'école à l'âge de 13 ans.

 

Faratiana a choisi son métier d’avocate par vocation. Elle a aujourd’hui 20 ans de barreau à son actif. Également mère de famille dévouée et chrétienne, elle nous raconte son parcours et son quotidien avec passion.

 

 

«Vocation : avocate ! »

Faratiana, 42 ans, est mariée à son amour de jeunesse, Rija, depuis 20 ans. Ils sont parents de deux enfants : une fille de 18 ans, Liantsoa et un garçon de 15 ans, Yoël. Faratiana fête également ses 20 ans de carrière. Avocate au Barreau de Madagascar, elle a prêté serment devant la cour le 21 septembre 1997 à l’issue de quatre années d’études à la Faculté de Droits d’Antananarivo. « Poursuivre mes études au pays est un choix, nous explique Faratiana. Le droit malgache m’a particulièrement intéressé car il est resté soit au stade archaïque de la colonisation, soit calqué sur le droit civil français de 1960. Par ailleurs, les législateurs ont intégré, notamment en droit civil, des notions et des termes issus des us et coutumes du pays. » Faratiana se souvient des efforts fournis tout au long de ses études universitaires. « Souvent, les cours commençaient à six heures et finissaient vers dix-huit heures, raconte l’avocate. Parallèlement, il fallait trouver du temps libre pour entreprendre les travaux de recherche. Mais la vocation que j’avais en moi m’a grandement facilité la tâche. J’ai obtenu ma maîtrise en droit privé avec mention assez bien. » Fière de son parcours, la mère de famille ne tarit pas de souvenirs : « Le lendemain des résultats, j'ai cherché dans tout Tanà un avocat qui voudrait m'enseigner le métier. C'était un parcours du combattant étant donné que je ne connaissais personne. Au bout d’un mois, une avocate de grande notoriété a bien voulu m'accueillir. J’ai effectué un an de pré-stage chez elle. J’y ai appris le métier : secrétariat, course de greffe, rédaction, traitement de dossier, tenue des audiences, réception des clients. J’ai continué mon stage d’avocat obligatoire dans cette étude pendant trois ans. »Sans l’accord du Bâtonnier, Faratiana n’est pas en mesure de nous communiquer des détails concernant son métier, notamment ses revenus salariaux. Dans la pratique, les tarifications sont libres. Elles dépendent de la nature de l'affaire et de la complexité du dossier. D’après notre enquête, les honoraires des avocats avoisinent, en moyenne et hors taxe, 1.000.000 d’ariary (285 euros) pour les procédures de divorce, 2.000.000 d’ariary (271 euros) en cas de litige foncier et 3.000.000 d’ariary (857 euros) s’il s’agit d’une affaire commerciale. « Nous percevons également des consultations juridiques, précise l’avocate, lesquelles sont calculées en fonction du temps de travail et de la difficulté de la question. »

 

Disponible pour les enfants

Faratiana a choisi de pratiquer une profession libérale pour pouvoir s'occuper de sa famille. « Je voudrais me rendre disponible pour mes enfants, explique-t-elle. C’est important pour moi ». Comme beaucoup de femmes malgaches, la mère de famille se lève tôt, à 05h30 au plus tard, surtout en semaine. Avec son mari, elle dépose les enfants à l’école en voiture et les récupère en fin d’après-midi. « C’est Rija qui conduit. Je n’ai pas le permis, ajoute-t-elle. Nous profitons des trajets pour discuter. » Ensuite, elle se rend à l’Étude. L’avocate travaille de 07h 30 à 16h 30. Son mari, propriétaire et gérant d’une société spécialisée en publicité numérique et consultant en expertise maritime, possède aussi des horaires souples. Le mercredi après-midi, Faratiana reste avec les enfants à la maison. Après une petite sieste, elle assiste son fils et sa fille dans leurs devoirs et recherches. Si le temps le permet, la famille termine la journée devant les dessins animés Disney : « Nous sommes fans », explique la femme de loi. Le soir, la famille se retrouve à table pour le dîner et se couche au plus tard vers 20h 30. Leur weekend s’avère tout aussi chargé. Le Samedi matin est consacré aux courses et autres devoirs familiaux. L’après-midi, Faratiana et ses enfants se rendent à l’école de l’Église Baptiste. En tant que monitrices, mère et fille apprennent aux enfants de 3 à 6 ans la bible à travers des activités manuelles et culturelles. Son fils, lui, intègre le groupe des adolescents. « En ce moment, nous préparons le spectacle de Noël », nous confie l’avocate. Le Dimanche, toute la famille retourne à l’Église dès 08h00 du matin afin d’assister au culte. Le midi, ils déjeunent alternativement chez ses parents et ses beaux parents. L’après-midi, ils participent aux enseignements bibliques de l’Église. Dès fois, ils rentrent à la maison.

 

Un projet de plus de 80 millions d’ariary

Auparavant, la famille louait une maison à Nanisana, banlieue proche de Tana. Mais depuis trois mois, ils vivent chez les parents de Faratiana en attendant de déménager dans leur propre maison à Antanetibe Ilafy, une banlieue située au nord-est de Tanà. La maison, en construction, compte 192 m² de surface habitable partagée sur deux niveaux. Elle comporte 1 grand living, 3 chambres, 2 toilettes et 2 salles de bains. Les travaux ont été confiés à des ouvriers. Le père de Faratiana surveille le chantier. Le projet leur a déjà coûté 80.000.000 ariary, hormis le prix du terrain et le coût des travaux de finition. Faratiana, remercie Dieu d'avoir placé un rêve dans son cœur et de l'avoir réalisé ; celui de devenir avocate et de protéger les faibles. « La vie m'a appris que finalement nul ne peut changer le monde, nous confie-t-elle, mais que je peux apporter de l'aide, un sourire, des paroles d'encouragement tout en étant bien payée. De plus, j'en profite, dans la mesure du possible, pour servir le Seigneur en aidant la famille en Christ. Pour les Baptistes, mes prestations sont gratuites. Je suis heureuse parce que j'ai Jésus dans mon cœur, je crois qu'il m'a sauvé pour l’Éternité mais également pour la vie présente. Ma famille me comble de bonheur. Je suis très casanière et déteste les sorties et mondanités. »